Nouveau succès dans l’intégrale Beethoven par Paavo Järvi
lundi 6 octobre 2008 par Benoît Donnet
ClassiqueInfo avait déjà salué, il y a quelques mois, l’insigne réussite de la vision dramatique et profondément juste des Symphonies n°3, 4, 7 et 8 de Beethoven que défendait Paavo Järvi dans les premiers volumes de son intégrale RCA. Ce nouveau disque, qui couple la Première et la Cinquième, ne nous a pas déçu.
On y retrouve les ingrédients qui font de cette intégrale Järvi/Deutsche Kammerphilharmonie l’un des apports majeurs à la discographie quasi-saturée des symphonies de Beethoven de ces dernières années : une lecture décapante, fraîche, immensément originale et à l’intérêt semble-t-il inépuisable. Järvi, sans verser dans l’histrionisme vain, dirige ces œuvres surjouées comme personne ne l’a tenté auparavant : sa formation virtuose, allégée, à la pâte sonore mobile et transparente mais solide, nous permet d’apprécier des détails d’orchestration et de contrepoints tout à fait inédits, ce qui peut sembler surprenant, compte tenu du nombre exponentiel de versions existantes – mais se révèle totalement véridique. Personne mieux que Järvi n’a su éclaircir, clarifier les dialogues rageurs des cordes dans le troisième mouvement de la Cinquième symphonie ; personne non plus n’a rendu plus chambriste et plus lisible l’Andante de la Première.
Cependant, il n’y a pas ici qu’un simple travail d’allégement, qui serait somme toute louable mais peu original ; le Beethoven de Paavo Järvi est passionnant, non seulement parce qu’on y discerne tout, mais encore parce que le chef sait donner vie à la musique, en millimétrant chaque crescendo, chaque dialogue de pupitres, chaque équilibre, chaque inflexion de tempo, même minime. Sa lecture n’a rien d’académique (ni dans le sens de la tradition romantique, ni dans celui du baroquisme militant), elle ne cherche à prouver aucun dogme interprétatif, elle « est » Beethoven, avec sa violence, son lyrisme, ses doutes et son humour, que l’on a rarement perçu si mordant et facétieux que dans la Première symphonie interprétée par Järvi. Une telle communion entre un compositeur et une façon de le jouer est à la fois exceptionnelle et digne de tous les éloges.
De fait, nous n’avons que des louanges à adresser à ce disque, irréprochable à tous points de vue : la prise de son est parfaite (la clarté des basses y est exemplaire), l’espace sonore est idéalement exploité – la scansion de timbales dans le troisième mouvement de la Cinquième est tout simplement « la » scansion qu’il fallait, ni plus, ni moins –, les timbres sont de toute beauté (quel chant dans l’Andante de la même symphonie !), tout respire, dans une idéalité rarement atteinte par les interprètes, particulièrement dans ce répertoire où il y a toujours un reproche à faire à l’exécutant. Ici, on sent dès les premières secondes du disque l’immense compréhension que chaque musicien possède, certainement issue d’une maturation de plusieurs années, des œuvres qu’il interprète. Le dialogue des différents pupitres dans le premier mouvement de l’ut mineur ou dans le finale de la n°1 témoigne d’une communauté d’esprit franchement épatante entre tous les instrumentistes.
Nous ne nous répandrons donc pas plus en éloges : vous l’aurez compris, ce disque est indispensable.
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