Le rare Concerto românesc de Ligeti qui ouvre la soirée témoigne des racines transfrontalières de la famille du compositeur : des juifs hongrois vivant en Roumanie. Dans cette partition de jeunesse réalisée à partir de souvenirs et de documents de l’Institut folklorique de Bucarest, Ligeti en fait une sorte de synthèse.
Les thèmes transylvaniens qui enchantent ces pages très légèrement dissonantes prennent la forme d’un concerto grosso. Paavo Järvi et ses musiciens réalisent très finement ce mélange sous influence où l’on retrouve autant Enesco que Bartók. La finesse n’est pas ce qui caractérise la création française qui suit.
Commande conjointe d’une foultitude d’institutions dont la Philharmonie de Paris, After the Fall se présente comme le troisième concerto pour piano de John Adams. Le compositeur l’a écrit en pensant au jeu de son dédicataire, le pianiste islandais Vikingur Ólafsson, et l’a assorti d’une référence à un propos de Boulez sur la prédiction de la fin des avant-gardes menant au retour des amalgames et des citations. De fait, cette musique présente de manière assez téléphonée l’infiltration du Prélude en ut mineurextrait du Clavier bien tempéré de Bach.
Après de longs prolégomènes répétant des procédés typiques du compositeur, le thème triomphe dans une orchestration clinquante avant de se dissoudre enfin. La partie de piano très développée permet à Ólafsson d’exhiber sa force de frappe : une sonorité brillante, impavide et invariable assortie de phrasés mignards. Face au succès, il gratifie le public de deux bis dont un extrait des Variations Goldberg.
La Symphonie Rhénane de Schumann donnée après l’entracte permet de retrouver un tout autre niveau musical et de goûter pleinement les qualités de la Tonhalle de Zurich, une formation aux pupitres particulièrement homogènes. La lecture de Järvi se caractérise par des tempos enlevés et une extrême intensité expressive.
Voici un Rhin plutôt bouillonnant où la lumière varie sans cesse et où l’on danse dans une joie frénétique. Les tenants d’une approche plus majestueuse en seront sans doute pour leurs frais, même dans le Feierlich où le choral tranche par une certaine sévérité. Mais tout ceci respire avec superbe par l’habileté du chef à laisser l’orchestre jouer, se concentrant sur le modelé et la relance de phrasé d’une haute éloquence. |  |  |
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