À AIX, LE FESTIVAL DE PÂQUES TROUVE SON RYTHME DE CROISIÈRE

resmusica.com
Florence Michel
12.04.2018




Autre programmation alléchante en cette fin de deuxième semaine : la venue de Paavo Järvi accompagné du Deutsche Kammerphilharmonie Bremen. Au cours de cette soirée consacrée à Johannes Brahms, la violoniste allemande Veronika Eberle interprète le fameux concerto du Maître. L’introduction de l’Allegroatteint des sommets expressifs. Bois aériens, violons cristallins, gravité des cuivres… Du velours pour la jeune soliste, dont le jeu solide s’illustre avec passion et qui apparaît plus convaincante dans le registre dramatique que dans les nuances douces. Avec un jeu plein souvent viril et une façon toute particulière d’attaquer la première note de certains phrasés, la violoniste se livre totalement, sans retenue. Si ses aigus sont magnifiques, la véhémence du discours fait la différence dans les mises en tension et les montées en puissance. La direction magistrale de Paavo Järvi déploie une pâte orchestrale équilibrée. Il offre une vision sur la grande ligne mais aussi un soin fluide du détail. Le dialogue qui s’instaure ne manque pas de contrastes ni de profondeur. Le Finale est à ce titre brillant, sans être pour autant clinquant. Sa tonalité tzigane et jubilatoire épouse parfaitement la technique incisive d’Eberle, longuement applaudie par les festivaliers.

La Symphonie n° 1 de Brahms constitue le deuxième morceau de choix de ce concert. Par bien des aspects, elle s’apparente à la Quatrième de Schumann, mais aussi à la matière beethovénienne notamment avec la tonalité d’utmineur, de connotation tragique, ou avec l’utilisation de cellules rythmiques obsédantes sans parler du thème dans le Finale qui fait penser à l’Ode à la joie. Pourtant, l’essence même de cette œuvre est bien brahmsienne, notamment du point de vue de l’originalité du langage harmonique, sans oublier les réminiscences picturales des contrées nordiques, avec la nature qui n’est jamais loin.

Le Deutsche Kammerphilharmonie respire cette musique et gomme toute lourdeur. On est saisi d’emblée par l’unité et la finesse de la construction qui ne force aucun tempo. Chaque plan est d’une clarté exemplaire. Une seule voix s’élève des tutti avec une puissance vibrante sans tomber dans l’emphase. Chaque pupitre brille par la beauté de ses solos, en particulier la remarquable section des bois. Le Un poco Allegretto e grazioso met en lumière avec fraîcheur la douceur d’un tableau champêtre avant ce Finale monumental marqué par une progression magistrale. Les musiciens offrent en bis deux Danses Hongroises de Brahms comme pour prolonger l’invitation au voyage.

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