L'Orchestre de Paris prend un nouvel élan
Le Figaro
17/09/2010
Le chef estonien Paavo Järvi entame sa première saison avec l'Orchestre de Paris.
Le concert inaugural d'un nouveau directeur musical revêt toujours une portée symbolique, même si le chef et l'orchestre se connaissent. C'est un coup d'envoi pour le moins impressionnant que Paavo Järvi a donné à sa première saison à l'Orchestre de Paris, mercredi Salle Pleyel. Le programme, d'abord, audacieux, sans tubes : un vrai manifeste, avec pour axes la musique française, culture de l'orchestre, et la musique nordique, culture du chef. Un programme très pensé avec deux compositeurs nés la même année, Paul Dukas et Jean Sibelius, dont chacun s'inspire d'une légende. La Péri, de Dukas, manque bien un peu de poésie et de mystère, dans cette interprétation aux couleurs très franches mais on admire déjà la balance entre les pupitres et les relais de timbres (il est vrai qu'avec un Michel Benet au hautbois, un Pascal Moraguès à la clarinette ou un Marc Trénel au basson, cela aide : quelle équipe, tout de même !).
Souffle épique
L'Orchestre de Paris n'avait jamais joué le Kullervo, de Sibelius, premier chef-d'œuvre d'un compositeur de 25 ans qui n'osa pas l'appeler «symphonie». C'est une fresque fascinante, qui plonge dans les racines de l'épopée nationale finlandaise tout en expérimentant de nouveaux langages musicaux. Järvi, qui en a livré au disque une version de référence en 1997 (Virgin), a mis toute sa force de persuasion à initier l'orchestre à la radicalité de cette musique. Avec succès, à en juger d'après l'attitude des musiciens : ce que l'on a perçu comme une légère crispation au début s'est vite transformé en une formidable concentration individuelle et collective.
On est frappé par un mélange de souffle épique et de netteté sans épanchement qui pourrait bien être une marque de fabrique du chef. Tout à la fois narrative et très construite, sa direction culmine dans les scènes vocales de la dernière partie. La présence faramineuse des solistes Soile Isokoski et Juha Uusitalo, et la puissance tranchante des chœurs d'hommes, issus de la réunion du chœur de l'Orchestre de Paris et celui d'Estonie, placent ce début de règne sous le signe de l'excellence.
Prochain concert de l'Orchestre de Paris sous la direction de Paavo Järvi, les 13 et 14 octobre, Salle Pleyel. Loc.: 01 42 56 13 13.
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