Paavo Järvi "J’aime être surpris"

Par Franck Mallet | CLASSICA | SUR SCÈNE | 7 septembre 2010
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Le chef estonien a toujours placé ses concerts et ses disques sous le signe de la diversité. Pour sa première saison à la tête de l’Orchestre de Paris, jadis dirigé par l’illustre Charles Munch, il reste plus que jamais fidèle à cette règle.

Avec son physique de militaire et son regard bleu acier qui vous transperce, Paavo Järvi n’est peut-être pas sans rappeler Vladimir Poutine. Mais la comparaison s’arrête là... Car celui qui officiera comme directeur musical de l’Orchestre de Paris dès septembre est un artiste, un vrai. Né en 1962 en Estonie alors sous domination soviétique, il a eu la chance d’avoir pour père le chef d’orchestre Neeme Järvi, qui ne se contentait pas de la "diète" de l’enseignement russe. À chaque retour de voyage, la bibliothèque familiale s’enrichissait de trésors : partitions, orchestrations diverses, enregistrements... Leçons de piano, opéra quasiment tous les soirs, la vie à Tallinn s’est révélée extrêmement profitable ; tel musicien entendu sur scène, Emil Gilels, Mstislav Rostropovitch, Igor Oïstrakh par exemple, apparaissait le soir même à la porte du domicile !

Tout en jouant au sein d’un groupe de rock, et après une double formation de percussionniste et de direction d’orchestre (comme Jean-Claude Casadesus), le jeune Paavo quitte l’Estonie à dix-sept ans pour compléter ses études à l’étranger. Formé au Curtis Institute de Philadelphie et au Los Angeles Philharmonic Institute, il devient l’un des élèves préférés de Leonard Bernstein, comme en témoigne quelques années plus tard ce mélange de tranchant et de sobriété marquant son interprétation de plusieurs oeuvres de son mentor qui font l’objet d’un de ses premiers disques.

Dix ans plus tard, ses concerts, dont plusieurs déjà à la tête de l’Orchestre de Paris, et sa discographie sont d’une impressionnante diversité, des musiciens du Nord (Lepo Sumera, Arvo Pärt, Wilhelm Stenhammar, Sibelius, Grieg) aux Russes (Chostakovitch, Prokofiev, Stravinsky) en passant par l’Europe de Schumann, Bruckner, Mahler, Debussy, Ravel, Britten, Poulenc.


Un fan invétéré

En plus de ce vaste répertoire, il compte bien trouver à la tête de l’Orchestre de Paris un équilibre idéal lui permettant de développer plusieurs projets qui lui tiennent à cœur : "des cycles symphoniques dévolus à Haydn, à Bruckner, mais aussi à plusieurs partitions françaises, comme celles de Roussel et de Honegger notamment, qui mériteraient une plus grande reconnaissance internationale".

Il est flatté d’arriver à la tête d’une formation jadis dirigée par l’illustre Charles Munch, dont il possède tous les disques... Car, à l’image de son père Neeme et de son frère Krystian (également chef d’orchestre !), il avoue être un collectionneur, un fan invétéré. D’ailleurs, les Parisiens apprécieront son prochain concert où La Péri de Paul Dukas est placée en regard du grand poème symphonique Kullervo de Sibelius, inspiré d’un épisode de la vaste épopée du Kalevala finnois et destiné à une soprano, un baryton, un chœur d’hommes et un orchestre. Une manière de créer l’événement, car il redoute trop au concert la lassitude des programmes archirebattus : " Il faut susciter la curiosité, sans pour autant être racoleur ; moi, j’aime être surpris."

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